Un bunker inoffensif planté au bord de l’Escaut. De là que pouvons nous surveiller ?
Quelques péniches s’affairent lentement à transporter du sable et de la ferraille, le fil de l’eau est presque immobile, sur les quais la circulation est modérée.
Ce château-fort peu moyenâgeux ne retient en ses flancs aucune belle prisonnière. Est-ce l’antre d’un mangeur d’enfants ?
Ou plutôt la cache de fameux flibustiers hennuyers ? Peut-être qu’en fouillant méthodiquement la place, serait-il possible d’y mettre à jour un trésor de guerre ?
La couronne d’un roi mérovingien, un collier d’os de lointaine provenance africaine, ramené des colonies par un marchand d’esclaves ?
Mais peut-être n’y découvririons-nous que quelques bouts de lanières de sandales de travailleurs ébouillantés, les restes d’un casse-croûte fossilisé dans la chaux ?
Curieusement cette caverne ne recèle aucun signe de vie humaine. Aucune écriture ne vient intriguer le visiteur, aucune niche ne semble avoir contenu le moindre objet.
Seuls de gigantesques entonnoirs de briques occupent le centre de plusieurs grandes pièces, tels d’antiques silos de réacteurs d’une centrale atomique de l’âge de la pierre.
Mais peut-être faut-il être beaucoup plus sérieux ?
De qui ou de quoi ce gigantesque caveau pourrait-il bien être la tombe ?
D’un minotaure désespérément seul et frigorifié, pestant d’être abandonné dans cet antre humide, où nul labyrinthe n’est là pour stimuler ses phantasmes ? Lorsque de ses sabots maladroits il essaie d’entrouvrir les vantaux d’acier rouillé placés par ses geôliers pour le soustraire à la vie au grand jour, il rêve encore à une vie meilleure. Mais c’est peine perdue, il ne réussit qu’à griffer la brique et le fer récalcitrant.
La tombe de personne ? Préparée il y a bien longtemps, et n’ayant jamais servi. Un caveau sans destination, sans emploi, sans autre signification que le vide qu’il contient.
Lorsque les ventaux s’entre ouvrent ; à qui cette lumière aveuglante est-elle destinée. ?
Une effraction de ce monde clos et noir.
Jacques Vandamme Mai 2011